Coût de Calcul et filtres dégradés

Les différents filtres de Kalman à rang réduit représentent des approches réalistes permettant l'implémentation du filtre de Kalman à des problèmes complexes et de grandes tailles.

En effet, alors que l'utilisation des filtres de Kalman ou de Kalman étendu nécessitent des ressources informatiques hors de portée pour des problèmes de grandes tailles comme l'océanographie ou la météorologie, le passage à un sous-espace représentatif de taille beaucoup plus petite permet la mise en \oeuvre réaliste des méthodes utilisant cette technique.

L'intérêt pour ces différentes formes d'assimilation de données séquentielles varie en fonction des besoins et capacités. Autant l'interpolation optimale est simple à mettre en \oeuvre et d'un coût extrêmement réduit, autant les filtres SEEK et SEIK représentent déjà un investissement important dans le cadre de problèmes de grandes tailles. Le filtre SEIK peut être considéré comme une variante du SEEK pour lequel la linéarisation est remplacée par une interpolation linéaire. Il résout partiellement le problème de la non-linéarité du filtre SEEK. Outre sa plus grande stabilité, il est plus simple à implémenter car il ne nécessite par le calcul du gradient du modèle d'évolution. Néanmoins, son coût est quasiment équivalent à celui du filtre SEEK car l'évolution de leurs bases de correction respectives requiert l'intégration du modèle $r+1$ fois afin de faire évoluer les états interpolés du premier et les vecteurs de la base du deuxième. Ces deux filtres restent donc chers pour des problèmes de grandes tailles comme l'océanographie. En effet, le coût de ces deux filtres est supérieur à $r+1$ fois le coût du modèle d'évolution.

Il est néanmoins possible de réduire ces coûts en simplifiant l'évolution de leur base de correction. Ce qui est évidement le seul moyen permettant de réduire les coûts.

Brasseur (1999) ont été les premiers à suivre cette idée en proposant de ne garder que la base de correction initiale du filtre SEEK, calculée par une analyse EOFs, fixe dans le temps. Néanmoins, l'expérience montre que le filtre ainsi obtenu présente des instabilités lors du passage du modèle dans une période instable. En effet, les EOFs formant la base de correction ne captent, le plus souvent, que la variabilité globale de l'état du système. Ainsi, comme ce filtre ne fait pas évoluer sa base de correction pour suivre la dynamique du modèle, sa correction ne sera plus efficace lors des instabilités du modèle. Ce filtre se nomme Filtre de Kalman Singulier à base Fixe (SFEK)SFEK Filtre de Kalman Singulier à base fixe et assume donc l'hypothèse que l'opérateur du modèle d'évolution peut être considérer comme l'identité ($M={\mathbf I}$).

Un autre moyen efficace de réduire les coûts des filtres SEEK et SEIK est d'utiliser la propriété de convergence du filtre de Kalman vers un régime permanent. Ainsi, après un certains temps, la base de correction des filtres SEEK et SEIK reste constante. Il est alors possible de construire un nouveau filtre de Kalman étendu (ou interpolé) singulier à base asymptotique noté SAEK5.3 SAEKFiltre de Kalman étendu singulier à base asymptotique (ou SAIK5.4 SAIKFiltre de Kalman interpolé singulier à base asymptotique) qui opère exactement comme le SEEK (ou le SEIK) durant les premiers temps du filtrage et comme le SFEK ensuite. Néanmoins, la propriété de convergence n'est pas valable dans le cas de modèles non-linéaires comme ceux en océanographie. Ce n'est pas non plus une condition suffisante et seule l'expérience et la comparaison des filtres SEEK et SAEK (ou SEIK et SAIK) peuvent permettre de vérifier la valeur de ces filtres. Enfin, en ce qui concerne le coût, ces filtres sont nettement moins coûteux que des filtres SEEK ou SEIK.

Dans le cas de problèmes faiblement non-linéaires, il est imaginable que la matrice de covariance d'erreur d'analyse tende rapidement vers un régime "semi-fixe" dans lequel elle évolue lentement. Dans ce cas, la base de correction va aussi évoluer lentement. Il alors possible de créer une variante du filtre SEEK (ou SEIK) nommé SIEEK5.5 SIEEKFiltre de Kalman étendu singulier à base évolutive par intermittence (ou SIEIK5.6) SIEIKFiltre de Kalman interpolé singulier à base évolutive par intermittence qui est capable de faire évoluer cette base selon deux régimes après une période d'initialisation avec le filtre SEEK (ou SEIK). Un régime fixe pour lequel la méthode est la même que pour le SFEK et un régime de rattrapage pour lequel la méthode redevient un SEEK (ou SEIK). Ces nouveaux filtres sont, eux aussi, beaucoup moins coûteux.

Il est aussi possible de faire évoluer les vecteurs de la base de correction sur une grille plus grossière que celle du modèle. Cette méthode réduit les coûts de calcul mais aussi les besoins de stockage.

D'une autre manière, il est aussi possible de ne faire évoluer qu'une partie de la base de correction et de garder l'autre partie fixe dans le temps. Ce filtre se nomme SSEEK5.7 SSEEKFiltre de Kalman étendu singulier à base semi-évolutive (ou SSEIK5.8) SSEIKFiltre de Kalman interpolé singulier à base semi-évolutive dans le cas d'une évolution du SEEK (ou du SEIK). Son coût est, bien sûr, dépendant du nombre de vecteurs de base qui évoluent.

Dans tous ces exemples, lorsque le modèle est stable, les formes dégradées du SEEK et SEIK se comportent aussi bien que le SEEK et SEIK mais peuvent être de deux à dix fois plus rapides. Lorsque le modèle est en période instable, les performances de ces filtres se dégradent notablement.

Enfin, il est aussi possible travailler sur les EOFs en utilisant une base d'EOFs locales ou mixte. La thèse de Ibrahim Hoteit (2001) permet d'avoir une vision précise d'un grand nombre de ces variantes.

Nicolas Daget 2007-11-16